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La punition corporelle des enfants
en Cour suprême canadienne
Lettre n°7, août 2003

 

Les juges de la Cour suprême du Canada ont accepté de se pencher sur la validité d’un article de loi autorisant le recours au châtiment corporel des enfants.

L’article 43 du Code criminel canadien permet à un enseignant, à un parent ou à un travailleur en milieu de garde de corriger un enfant à la condition que la force utilisée ne dépasse pas la mesure raisonnable dans les circonstances. Vieille de 110 ans, «cette disposition législative était à l’origine fondée sur le droit de frapper les prisonniers, les employés ainsi que le conjoint (en autant qu'il était, bien sûr [sic], de sexe féminin) et les enfants», nous apprend Alain-Robert Nadeau, avocat et docteur en droit constitutionnel (1).

Cet article de loi est contesté par la Fondation canadienne pour les enfants, les jeunes et le droit (2) au motif qu’il contreviendrait à la Charte canadienne des droits et libertés. L’organisme bénéficie de nombreux appuis dont celui de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse du Québec. Pour sa part, le ministère fédéral de la Justice défend le droit de recourir à la correction physique ; il bénéficie de l’appui entre autres de la Fédération canadienne des enseignants et de Coalition pour l'autonomie de la famille, un groupe conservateur (3).

Le Canada n’est pas le seul pays où la question de la punition corporelle infligée aux enfants est débattue. En Angleterre, par exemple, le sujet soulève de vives controverses, particulièrement depuis le décès d’une fillette de huit ans ayant succombé, en février 2000, aux coups portés contre elle par sa grand-tante (4). Mais la principale justification qu’avancent les tenants de la punition corporelle est celle du maintien de la discipline à l'école . Devant ce phénomène, nous rapporte Yohji Morita (2001), la Cour suprême de Tokyo rendait, en 1981, un jugement autorisant le châtiment corporel dans certaines limites, «afin de permettre aux écoles d’éduquer les enfants (5).».
Les opposants à la punition corporelle invoquent l’obligation pour les États de respecter des droits de l’homme et, en particulier, la Convention relative aux droits de l’enfant dont l’article 19.1 qui stipule que «Les Etats parties prennent toutes les mesures législatives, administratives, sociales et éducatives appropriées pour protéger l'enfant contre toute forme de violence, d'atteinte ou de brutalités physiques ou mentales, d'abandon ou de négligence, de mauvais traitements ou d'exploitation, y compris la violence sexuelle, pendant qu'il est sous la garde de ses parents ou de l'un d'eux, de son ou ses représentants légaux ou de toute autre personne à qui il est confié.»

En avril 2001, Genève fut l’hôte du lancement d’une initiative mondiale visant à mettre fin aux punitions corporelles infligées aux enfants (6). Ce regroupement de défenseurs des droits de l’enfant bénéficie d’un large soutien, notamment de la part de l’UNICEF et du Haut commissaire pour les droits de l’homme de l’ONU. Par ailleurs, des membres de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe ont récemment déposé une proposition de recommandation visant à interdire, au niveau européen, le châtiment corporel des enfants (7).

Actuellement, 11 États dans le monde possèdent des législations interdisant toutes formes de châtiments corporels aux enfants au sein de la famille, à l’école ou dans les centres de détention (8).

 


Illustration : Dessin de Garnotte, tiré du site profdedroit

http://profdedroit.unblog.fr/la-fessee-est-elle-un-attribut-de-lautorite-parentale/

 

Notes de bas de page

 

(1)  http://www.barreau.qc.ca/journal/frameset.asp?article=/journal/vol34/no19/
justiceetsociete.html

 

(2)  http://www.jfcy.org/corporalp/corporalp.html

 

(3)  http://www.ledevoir.com/2002/10/18/11490.html

 

(4)  http://news.independent.co.uk/uk/politics/story.jsp?story=418516

 

(5)  Violence à l’école : l’approche japonaise. In : «Violence à l’École et politiques publiques» ( sous la dir. de : Éric. Debarbieux et Catherine Blaya). Paris : ESF, 2001, 65-93.

 

(6) http://www.endcorporalpunishment.org

 

(7)  http://assembly.coe.int/Documents/WorkingDocs/doc03/FDOC9716.htm

 

(8)  La Suède fut le premier État à agir en ce sens, en 1979. Vinrent ensuite : la Finlande (1983), la Norvège (1987), l’Autriche (1989), Chypre (1994), le Danemark (1997), la Latvie (ou : Lettonie,1998), la Croatie (1999), l’Allemagne et Israël (2000) et l’Islande, en 2003.

 

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