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Éduquer aux droits de l'homme et à la paix, les fondements
Lettre n°41, juillet-août 2007

TyrTous s’accordent à dire que la  connaissance des fondements juridiques de l’éducation et de la formation aux droits de l’homme (EDH) paraît tout à fait indiquée et nécessaire à la compréhension et à la prise en compte du droit dans l’enseignement. Cela a été dit et affirmé à juste titre par nombre d’éducateurs et didacticiens des sciences humaines et sociales. Nous ne reviendrons pas là-dessus. Par ailleurs, l’on conviendra de l’importance d’examiner d’autres fondements complémentaires des aspects juridiques de la question, mais en même temps  davantage liés aux processus d’apprentissage et aux dimensions sociales  de la formation. Jetons donc ainsi une vue d’ensemble sur les fondements scientifiques, curriculaires, socio scolaires et politiques de l’EDH.

 

Existe-t-il une approche scientifique de l’EDH ? Pour essayer de répondre à cette question, il nous faut en poser d’autres qui y sont liées. Ainsi, que nous apprennent en général les sciences de  l’éducation en cette matière ? Ce que l’on devrait dire, au départ, c’est que les « sciences » de l’éducation regroupent à la fois des savoirs qui sont le produit d’une démarche scientifique, mais aussi d’un certain nombre de croyances, voire de doctrines, qui, aussi légitimes puissent-elles être dans certains cas, n’en demeurent pas moins dépendantes de l’opinion que nous nous faisons de ce qui nous paraît être une « bonne éducation ». Pour peu que l’on puisse parler d’éducation scientifique aux droits de l’homme, peut-être à cet égard devrions-nous d’abord emprunter à la science une attitude qui la caractérise, soit celle d’employer un langage précis et de privilégier avec les apprenants une démarche fondée sur la résolution de problème et d’enquête. Au fond, c’est de rigueur dont il s’agit.  Le reste est affaire de bonne pédagogie.

 

Le curriculum est un ensemble structuré et cohérent des diverses composantes de la formation. Il couvre un large spectre allant des objectifs des programmes au système de valeurs promues par l’établissement scolaire. Il s’agit ici de voir comment, dans la réalité quotidienne de l’école, l’éducation et la formation aux droits de l‘homme peuvent être intégrées dans les programmes d’études et le projet éducatif de l’école de même que dans toute autre activité scolaire, parascolaire et périscolaire. Il y a là sûrement une question de volonté politique qui est en cause dans la mesure où les gouvernements sont concernés par l’EDH parce que ce sont eux qui doivent en approuver les objectifs et les contenus. Comme suite à la Décennie de l’ONU sur l’EDH et au Plan d’action qui la prolonge, peut-on dire, à cette heure, que les États ont intégré l’EDH dans les curricula ? En réponse, quelques-uns manifestent  une plus ou moins vague intention de le faire. C’est ce que révèle l’analyse de leur plan d’action. Il y a manifestement de ce côté un déficit d’intention et il convient d’examiner les pistes d’intervention les plus prometteuses de manière à inciter fortement les États à donner suite à leur engagement.

 

En tant que projet de société, l’EDH doit associer les communautés de proximité et les principaux acteurs à sa promotion et à son application. Dans un tel contexte, comment fédérer des expériences, des compétences et des savoirs par une mise en réseau renforcée et conséquente ? Le poids du nombre, la richesse des expériences et les carrefours d’idées sont potentiellement créateurs d’une masse critique nécessaire au développement de l’EDH. Les activités d’apprentissage qui ont souvent  le mieux réussi ont été celles qui associaient d’une manière ou d’une autre les ONG et d’autres membres actifs de la communauté.

 

Il faut également définir l’EDH comme un acte par lequel on apprend à devenir citoyen éclairé et responsable et à développer une conscience politique de l’organisation de la vie en société. Mais dans les faits, cette intention continue de susciter des craintes car elle suggère aux yeux de certains non pas ce qu’elle porte en elle de noble - l’art et la pratique de la gouverne des sociétés humaines -, mais plutôt ce que d’aucuns croient, à tort, qu’elle s’apparente à une politisation partisane des esprits. Dans cet ordre d’idées, l’analyse politique de l’éducation et de la formation aux droits de l’homme invite à des ruptures avec des représentations déformées du politique ; elle convoque également les éducateurs et les formateurs à un débat de fond sur les notions d’intérêt public et de défense du bien commun par l’application effective des droits de l’homme.

 

Le tracé pluridimensionnel de l’EDH commande qu’une formation initiale et continue des enseignants soit à l’ordre du jour des choix d’orientation des  facultés des sciences de l’éducation, des écoles normales ou de toute autre type d’institution chargé de préparer les futurs maîtres à l’exercice de leur métier. C’est au sein de ces institutions que les fondements de l’EDH peuvent être étudiés avec toute l’attention qu’ils méritent.

 

Illustration : Dessin de Leffel, tiré de l'album Dessine-moi un droit de l'homme, p. 26

 

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