On apprend, dans l’édition du 20 janvier dernier du quotidien Lyon Capitale, que les autorités de la ville avaient apporté leur soutien financier à « Street Wars », un jeu de rôle grandeur nature qui appelle les participants à simuler des meurtres à l’aide de pistolets à eau. Chacun, écrit-on, a une cible à abattre, disposant de sa photo et de son adresse, mais devenant aussi la victime potentielle d'un autre tueur à gages virtuel. Voilà comment des édiles municipaux invitent leurs concitoyens à rendre hommage au polar en jouant aux assassins.
Version soi-disant « festive » d’un appel fantasmé au crime, l’initiative plus que douteuse de ce conseil municipal conforte une tendance observée ailleurs de la banalisation de la violence symbolique par le jeu, sans parler de son industrialisation et des revenus gigantesques que celle-ci génère.
Sur le site même de l’initiative controversée on peut y lire « Si vous avez toujours rêvé d'être un tueur à gages, Streetwars est fait pour vous ». Rien de moins. On ne saurait y voir là un ersatz de thérapie individuelle ou collective, ce qui serait usurpatoire et faussement justificateur. Mais c’est par ailleurs bel et bien un objet d’inquiétude, un puissant avatar qui se moque des pédagogies de la paix que pratiquent nombre d’enseignants, justement pour proposer autre chose que des Paintball et autres jeux « gore » idoines.
L’institutionnalisation dans la cité de la violence par le divertissement a lieu d’inquiéter. La démocratie libérale est malade de ses dérapages et notre déficit de vigilance ne fait qu’entretenir ses excès. L’hyper individualisation de nos modes de vie rend toute critique collective malaisée.
D’autre part, il y aurait lieu que les divers paliers décisionnels s’interrogent sur la pertinence de subventionner ou d’accorder des privilèges fiscaux aux entreprises qui conçoivent, produisent et distribuent des jeux violents. À cet égard, le courage politique ne semble pas encore être au rendez-vous. Entre temps, les tueurs virtuels ont un bel avenir devant eux.
Références
Lyon capitale. « Le jeu qui n'amuse pas les élus lyonnais ».
http://www.lyoncapitale.fr/lyoncapitale/journal/univers/Actualite/Polemique/Le-jeu-qui-n-amuse-pas-les-elus-lyonnais
Le site de « Street Wars » : http://www.streetwarslyon.fr/
Ilustración : Le Progrès édition Rhône le 09/05/2009
http://www.streetwarslyon.fr/wiki/article/article_progres_bis_big.jpg