Avec l’adoption de l’examen périodique universel (EPU) par le Conseil des droits de l’homme, les organisations non gouvernementales (ONG) ont sans doute raison de penser que ce dispositif est l’occasion pour elles de faire entendre la voix de la société civile. Mais elles ont tout autant intérêt à demeurer vigilantes à l’égard d’une dynamique placée sous le contrôle entier des gouvernements et de leurs intérêts.
Rappelons d’abord que l’EPU est un mécanisme créé par la Résolution 60/251 de l’Assemblée générale, qui a institué le Conseil des droits de l’homme. La Résolution stipule que le Conseil aura pour vocation de « procéder à un examen périodique universel, sur la foi d’informations objectives et fiables, du respect par chaque État de ses obligations et engagements en matière de droits de l’homme de façon à garantir l’universalité de son action et l’égalité de traitement de tous les États ». Tous les États se présenteront une première fois, au cours des quatre années à venir, devant le Groupe de travail chargé de cet examen et constitué des 47 États membres du Conseil. Chaque État y présentera son propre rapport. Le Haut Commissariat aux droits de l’homme (HCDH) y ajoutera une synthèse des références relatives à la situation des droits de l’homme dans le pays faisant l’objet de l’EPU par des organes de l’ONU, ainsi qu’un résumé émanant d’autres sources pertinentes, notamment celles des ONG.
La société civile est directement concernée par cette nouvelle procédure. En effet, la résolution 5/1 du Conseil prévoit un engagement actif des ONG au sein de l'EPU. Celui-ci devrait, comme le souligne le Conseil, « garantir la participation de toutes les parties prenantes, y compris des organisations non gouvernementales et des institutions nationales des droits de l'homme, conformément à la résolution 60/251 de l'Assemblée générale en date du 15 mars 2006 et à la résolution 1996/31 du Conseil économique et social, en date du 25 juillet 1996, ainsi qu'à toute décision que le Conseil pourra prendre à ce propos ».
Si, en principe, l’EPU marque une avancée en matière de démocratie participative, nul ne saurait prédire dans les faits, du moins à l’heure actuelle, si l’optimisme qu’il induit chez les diplomates, mais aussi auprès des ONG, se vérifiera concrètement dans les politiques des États en matière de respect des droits de l’homme. On sait déjà que la culture de l’optimisme ne suffira pas, du moins à court et à moyen terme, à faire renouer le dialogue dans des pays où il est rompu depuis longtemps. L’on sait aussi que sans mécanismes de protection adéquats, des militants d’ONG resteront sous la menace de représailles si leur sens critique est jugé contraire « au bon ordre social » par des gouvernements dont la démocratie est le principal ennemi. Mais il est en revanche permis de penser que l’EPU constitue une bonne occasion de rendre les gouvernements davantage redevables de leurs politiques et de les placer devant une obligation de résultats.
Tout compte fait, la prudence est de mise : la prise en compte de la société civile au sein de l’EPU ne doit pas être tenue pour acquise. Et il ne faudrait pas non plus que la participation des ONGs à l ’EPU ne signe le début de leur instrumentalisation politique. En revanche, les ONG doivent saisir l’occasion de s’inscrire dans le processus pour imposer leur présence et leur savoir-faire dès le départ et pour éviter aussi, par leur absence, d’en être tout simplement écartées sans forme aucune de procès.
Références
Le site du Conseil des droits de l’homme :
http://www2.ohchr.org/french/bodies/hrcouncil/
Haut Commissariat aux droits de l’homme. « Note d'information à l'attention des ONG concernant l'Examen Périodique Universel ».
http://www.ohchr.org/EN/HRBodies/UPR/Documents/noteNGOFR.pdf