1. Observatoire : le mot et la chose
Il y a souvent une dissociation entre le mot et la chose. Cest le cas à propos du mot " observatoire ". Bien quil ny ait pas de définition académique des fonctions que lon attend des observatoires qui agissent dans le domaine qui est le nôtre ou dans des domaines qui lui soient apparentés, on peut constater que bien des organisations sen acquittent sans en porter le nom.
Cest le cas évidemment de bien des organisations intergouvernementales qui, pour mener à bien les missions que leur ont confiées leurs fondateurs, les Etats, sacquittent, bien ou mal importe peu, des missions qui sont celles dun observatoire : collecte et synthèse de linformation en vue soit de mieux informer leur décision soit de la fournir à leurs partenaires.
Cest le cas également de nombreuses organisations non-gouvernementales qui ne portent pas nécessairement le nom dobservatoire. On peut prendre pour exemple celui dAmnesty International dont le rapport annuel est la somme synthétisée des observations quelle a accumulées sur létat des droits de lhomme dans le monde. Et plus près de nous, lONG EIP est également à sa manière un observatoire dans le domaine quelle sest donné. Cest à partir dune fonction dobservatoire qui ne figure pas dans son label quelle poursuit la mission quelle sest donnée depuis sa fondation. Et donc, au-delà des mots, cest la construction de lobjet qui est lopération la plus importante dans la mise en place dun observatoire.
2. Observer quoi ?
Le mot " observatoire " quel que soit le domaine auquel il sapplique évoque tout de suite un certain nombre de fonctions qui font intervenir un aller-retour dialectique et permanent entre un objet théoriquement construit et le terrain des faits. Sans vouloir être exhaustif, ces fonctions sont les suivantes collecte de linformation, analyse de cette information, élaboration dinstruments danalyse du domaine considéré, diffusion de linformation aux personnes et institutions les mieux à même den tirer profit. Mais dans tous les cas, on ne collecte pas de linformation pour collecter de linformation ; cette collecte na de sens quen fonction dune finalité préalablement définie et doutils conceptuels qui permettent dappréhender le réel que lon se donne pour ambition de cerner.
Dans le domaine qui nous intéresse, et en schématisant à lextrême, cest-à-dire en allant à lessentiel, il est possible de réduire léducation aux trois éléments fondamentaux qui sont les suivants :
- des élèves et des enseignants ;
- des enseignements que dispensent les seconds aux premiers en vue de les former et,
- des méthodes pédagogiques, cest-à-dire les moyens et outils utilisés pour réaliser cette transmission de connaissances et donc, pour rendre cette formation possible..
Il ne sagit, de toute évidence, que dun schéma qui ne rend pas compte de toute la complexité de léducation notamment du fait que les éléments en question, loin dêtre dissociés, interagissent en fonction dun contexte économique, culturel, politique, culturel et social donné. Cette démarche est néanmoins nécessaire en vue de réfléchir sur lobjet qui nous réunit et, partant, en vue de circonscrire les missions qui devraient être celles de lobservatoire projeté. Elle permet de distinguer au sein du vaste champ de léducation ce qui relève du quantitatif (qui ? ; combien ? quel budget ? etc) du qualitatif (quelles formations ?, en vue de quelles finalités ?, etc).
Lobservatoire projeté na pas vocation à sajouter ni à concurrencer les institutions existantes, qui sans en porter le nom, jouent le rôle attendu dun observatoire. Cest le cas de nombreuses organisations intergouvernementales qui ont léducation pour champ que ce soit à titre principal ou à titre accessoire. On pense notamment à lUNESCO, au BIE, à lUNICEF, au PNUD, à lOCDE etc ; et ce, sans évoquer les organisations non gouvernementales qui interviennent dans ce domaine.
Que ces institutions divergent quant aux méthodes et instruments utilisés pour remplir leur mission importe peu pour lobjet du propos. Le croisement des données quelles publient permet davoir une certaine idée de létat de léducation dans le monde. Mais lon remarquera que, toutes, elles se limitent au quantitatif qui peut être rendu par des données chiffrées plus ou moins sophistiquées : taux de scolarisation, équipement, budgets, etc. Partant de là, se dégage le champ qui peut être imparti à celui dont nous projetons la création. Ce ne peut être que celui du qualitatif évoqué plus haut. Ce nest qua partir de là que peut être entamée la réflexion sur la décomposition de ce champ en unités cohérentes et sur les méthodes à mettre en uvre.
3. Observer pourquoi ?
Un observatoire na de sens que sil va au-delà de lobservation stricto sensu des phénomènes qui nous préoccupent ; un peu à la manière du caractère contemplatif que prend la retraite dun ermite dans le désert ou dans une grotte. Les fonctions quil est destiné à avoir nont de sens que si elles visent à mieux connaître la réalité en vue de la transformer.
Cest donc observer pour mieux sinformer et mieux informer. Il restera évidemment à définir à qui cette information est destinée.
Cest aussi observer pour agir sur la décision politique dans le sens qui est celui de notre ou nos organisations mais à partir dun corpus de référence qui est donné par les règles du droit international qui régissent léducation. Cela revient à attirer lattention sur les pratiques qui ont cours en ce quelles ont dincompatible avec ce corpus de référence.